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Regard sur l'intemporalité

06/01/2010

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J'ai traîné pour quitter les îles. J'aurais voulu fixer ce temps sur l'eau, prolonger l'écume blanche, la magnificence de tous les matins du monde, le doux claquement des vagues qui viennent frapper la coque lorsque ancre jetée pour la nuit, on attend autour de légendes et de pouvoirs occultes, des levers de lune visibles seulement là et à ce moment-là. À la lisière du jour et de la nuit, lorsque sur le fil invisible de passages obligés dieux et démons jouent des coudes et à petits meurtres entre amis, suscitant sur la terre et dans les villes et villages des humeurs assassines où les repères ont disparu avec les garde-fous et les rails de sécurité. Où le bien et le mal se confondent dans un magma incohérent qui mêle avec la même désinvolture le luxe et la misère.

La mer et l'eau ainsi que le sable et les déserts, sont propices aux prophéties. Bibliques, païennes, religieuses, du syncrétisme...

Je ne sais pas si la parole des saints est nécessaire cher av Alexandre, elle s'inscrit pour moi dans ce que je viens d'écrire, mais vous avez raison quand même parce qu'elle a cette valeur de foi et de croyance si nécessaire aux hommes. Et tort aussi parce qu'il y a loin de la coupe aux lèvres et que les hommes au travers de l'histoire, toutes églises confondues, se sont toujours servi de la foi et de leurs Dieux pour asservir les peuples et les soumettre à leur volonté.

Ni les Dieux ni la foi ne sont pourtant en cause, je suis croyante, mais ainsi qu'Abraham et Moïse, je ne suis soumise qu'à quelque chose du divin et sans nom avec lequel je traite en direct.

Il m'est impossible de passer par les hommes, imparfaits et si prompts aux détournements de la pensée, des actes et des écrits selon ce qui les arrange, l'histoire foisonne de fausses vérités.

Reste la pensée pragmatique, la philosophie et la réflexion.

Là aussi peu d'élus. On confond trop souvent culture, aisance intellectuelle, habitude de la dissertation et consensus élitiste, avec une véritable pensée dans laquelle le doute a toute sa place. Le doute sans lequel aucune ligne de force ne peut se dessiner.

En traînant les pieds et après un dernier bain, il m'a bien fallu pourtant ranger sandales, shorts et robes légères. Ce n'est que dans l'avion du retour que j'ai commencé à anticiper d'autres bonheurs : Air froid qui pique la gorge, chocolat et vin chaud, feux de cheminée... Le crépitement des flammes a donc accompagné la lecture des dernières chroniques de mon journal préféré.

Autant d'intelligence et de culture que le « Constat cruel de Noël » n'a pas démenti, m'a confirmé que LM pouvait hors érudition être dans l'émotion et l'âme, ce que ses chroniques savantes mettent parfois en retrait, mais surtout qu'il y avait dans ce creuset du Monde, un monde en soi, fait de partage, de gentillesse et d'enthousiasme. Voire de juvénilité, d'enfance...

La mer vraiment c'est comme le désert. Elle donne à voir autrement.

Le Moyen-Orient implose, la montée des eaux bientôt submergera les Maldives, mais l'intemporalité existe, je l'ai rencontrée. Elle oscille entre suave et sauvage, navigue où les âmes s'entremêlent, vous savez entre chien et loup, quand les repères s'estompent, mais qu'apparaît Lilou.

Quelques résolutions cette année.

Aller à Neve Shalom voir les nouveaux enfants d'Adam. Avec les enfants, on fera des prières sans nom. On priera le ciel, la terre et les blés qui font la farine et le pain, l'eau aussi et le sel qui l'accompagne parce que c'est meilleur. Je leur dirai « Oubliez les triangles, le père, le fils et le St Esprit, pensez quatre. Etendez-vous aux quatre coins cardinaux, l'univers c'est vous !

J'irai aussi à Bassorah parce que paraît-il je suis en « adéquation avec la ville » vient de m'écrire JP. Krief qui depuis deux ans et pour deux ans encore travaille à un film sur l'Irak et le Moyen-Orient. Son mail s'accompagnait d'un petit film réalisé pour moi : Une femme qui danse...

Et puis parce que parfois je me sens particulièrement proche de mes racines florentines, j'ai envie de vous dire en cette nouvelle année, que l'Italie est aux arts ce que l'Afrique est à l'humanité. Elle a inventé la couleur, les sons et la matière. D'un morceau de pierre elle fait une cathédrale. D'argile, de terre, de bronze ou de granit, elle fait des dieux. Elle capte la lumière pour peindre des madones, écrit la Divine Comédie et compose les Trompettes d'Aïda. Mais l'Italie est d'abord Toscane. C'est en Toscane que s'est élaborée l'Italie d'aujourd'hui, et comme disait Malaparte « Ils sont fous ces toscans, mais ils apportent l'intelligence aux pierres et font naître d'elles des églises et des palais, des tours mâles et de féminines places publiques ».

Quelques mots encore écrits en exergue sur un roman que j'ai publié en 2004 « La résultante ou Claire d'Algérie ». Des mots pour ma petite fille, qui dans les batailles d'identité nationale d'aujourd'hui, prennent une dimension singulière :

" Pour Justine, pour qu'elle n'oublie jamais que l'identité a la force et la grâce qu'on lui donne."

Happpy new year à tous. Que l'amour engendre la compassion et la compassion l'indulgence et la paix. Notre meilleur des mondes.

Louise

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