Du G20 à Joshua : la possibilité d'une aube.
04/10/2009
​
Peut-on rire de tout ?
Sans doute pas, et pourtant un seul petit verre de rosé en regardant le soleil se coucher sur les monts du Luberon et l'esprit vagabonde autrement, trouve à sourire de la tragédie, voire de la souffrance et des difficultés qui d'un coup ne donnent à voir que leur absurdité.
Au cours du mois de juin j'ai cessé de regarder et d'écouter les infos Françaises, agacée qu'elles soient si peu informatives et tellement mensongères sur ces questions qui vont de la prise en compte de l'humain, à ce système économique global qui bien qu'ayant démontré son inaptitude sera bientôt remis sur pieds, comme « s'ils » ne pouvaient concevoir d'autres systèmes que ceux dont ils ont l'habitude ou qui leur profitent si bien.
Des petits faits-divers donc, et un ronronnement médiatique qui anticipait des prochaines vacances, bref Clochemerle dans la petite lucarne. Crise intégrée, guerres, famines et maladies pouvaient perdurer, aucune communion nationale pour pleurer des disparus qui chaque jour s'ajoutaient à des listes déjà longues.
Mais la disparition de l'avion Rio/Paris reboosta le tout.
Enfin de quoi relancer l'audimat. L'émotion serait au rendez-vous des Français qui communieront dans la mort comme ils communient au café. Ou entre la poire et le fromage.
L'indignité, hélas, était toujours ce qu'elle était...
Tout ça pour dire.
Heureusement il y avait des soleils flamboyants pour croire qu'un jour le monde serait bon, et des enfants pour encore dire : Quand je serai grand je serai inventeur !
Heureusement il y avait la possibilité du vin. Juste un peu, quelques gorgées à peine, pas de quoi faire hurler les ligues anti-alcool.
Heureusement l'absurde avait toujours sa place et me faisait sourire même de ce qu'il ne fallait pas.
Exemple ?
La simple idée que le gouvernement soit parvenu à mettre la France entière sur le trottoir m'emplissait de jubilation. Ouvriers, SDF, lycéens, universitaires, médecins ou avocats, tous identiques sur le macadam.
Je vous l'ai dit quelques gorgées d'un vin frais sur le plateau de Valensole et cette France arrimée aux trottoirs m'enchantait comme un 14 juillet qui aurait pris le pouvoir, un trou dans un pantalon, un bras d'honneur à tous les intégrismes. C'était Ubu, Jésus et Raspoutine qui déclinaient à joie en veux-tu et à plus en pouvoir sur tous les frontons « maisons closes ». Vous suivez ?
Les gens dans les rues revendiquent leurs désirs dans un joyeux bordel tandis que les maisons dites de joie, abusivement appelées « maisons closes », sont maintenant réellement closes et vides de chair et de sens. Sens interdits, sens dessus dessous que les fumeurs se réapproprient sur les trottoirs, terrasses improvisées où ils se reconnaissent comme frères : de résistance, de plaisirs, de femmes et d'hommes qui passent. Si tant est que le plaisir est source de vie. Ce que je crois absolument. Qui pourrait ne pas y croire. Pas vous qui vous demandez où je veux en venir, avec quelque part sans doute, le désir d'en faire autant. Dire, dire librement et en vrac l'absurdité des choses et leur nécessité.
Vous voyez où un seul petit verre de rosé nous mène ? Me mène ? En sera-t-il autrement lorsqu'un décret aujourd'hui rejeté, mais qui une autre fois, en période de vacances, sera voté en douce et permettra que cette vinification particulière du rosé, devienne un simple mélange de vin blanc et de vin rouge au risque de mettre sur le trottoir (toujours on y revient) des vignerons qui s'évertuent à donner des lettres de noblesse à ce breuvage d'entre deux couleurs.
Alors au risque de déplaire, je veux avec Omar Khayam, Baudelaire, Rimbaud et les autres, boire encore un peu à la beauté du monde, si terrible soit-il, parfois.
D'autant que redevenue citadine, je ne peux toujours pas m'intéresser aux infos édulcorées qui surfent sur les ondes. À ces manipulations des masses qui suintent des paroles, sourires et regards de présentateurs pareils à des enfants respectueux des pouvoirs hiérarchiques qui les mettent en place.
Impossible d'apprécier ces faux penseurs qui ont à la fois peur de vivre et peur de mourir.
Ni ces dirigeants d'un G 20 dont pas un seul n'a en tête autre chose que sa propre gloire et son maintien au sommet. Ces représentants dont le capitalisme à tous crins est à l'origine des désastres actuels, et qui aujourd'hui récupèrent à leur profit un fantasmatique sauvetage planétaire. On se croirait revenu aux mauvais temps des Révolutions françaises et mexicaines où les bourgeoisies détournèrent à leur profit les nouveaux acquis.
Mais, et heureusement, il y a deux mois Joshua est né et a crié parce qu'il avait faim. Je lui ai donné son biberon sa toute petite main accrochée à la mienne et ses yeux grands ouverts fixés sur les miens, alors je me suis dis, et je me dis toujours, qu'il y a des milliers de Joshua, de Mansour et de Martin, et qu'avec eux, grâce à eux, demeure la possibilité d'une aube.
Louise Gaggini